Le roman À Rebours parait en 1884, sous la plume de Joris-Karl Huysmans au moment où le naturalisme bat son plein, et que Zola rencontre un franc succès avec sa fresque sociale des Rougon-Macquart. Pourtant, le roman de Huysmans s’attache à une mouvance littéraire inverse à celle de son temps. Ce dernier s’associe à un esprit de décadence qui frappe son époque marquée par une bourgeoisie en plein essor. Comme l’indique explicitement le titre thématique de son oeuvre, le roman de Huysmans annonce une opposition à son époque et ses contemporains. À Rebours raconte la vie de Jean de Floressas des Esseintes, un esthète raffiné, atteint de névrose qui s’isole dans une maison de Fontenay-aux-Roses en se cloitrant du reste du monde pour lequel il ressent un vif dégout. Dans le roman il ne se passe aucune réelle aventure romanesque, de plus, les épisodes semblent tous pouvoir se lire de manière aléatoire, il n’y a pas réellement de fil conducteur, ceci donnant lieu à une déconstruction du genre romanesque. Le chapitre IV de l’oeuvre, composé de trois épisodes, est représentatif de cette pratique littéraire : il présente l’épisode de la tortue, de l’orgue à bouche et du dentiste.
Chacun de ces épisodes évoque un sens de des Esseintes comme la vue pour la tortue, l’ouïe, le goût et l’odorat pour l’orgue à bouche, qui mènent aussi au souvenir du dentiste. Par la stimulation de ces sens, le chapitre IV vogue entre présent et souvenir à travers l’intériorité du personnage de des Esseintes. Dans le roman, l’attention n’est portée que sur son personnage et ses excentricités artistiques, s’éloignant des principes naturalistes qui s’intéressaient à la science, à l’expérimental et au social de l’époque ; ici seul l’individu compte.
L’intérêt de cette étude sera portée sur l’épisode du dentiste. Mais le passage qui sera spécifiquement analysé dans cet épisode du dentiste portera sur le moment où des Esseintes se trouve devant le lieu de travail du quenottier, se fait arracher la dent, et le moment où il en sort. Pour résumé ce passage, des Esseintes en buvant un whisky dans son fauteuil, grâce au goût et à l’odeur se remémore une odeur de phénol lui rappelant une senteur, un goût, qu’il avait eu quand il se rendait chez des praticiens dentaires. Suite à cela il pense à ces médecins, jusqu’au moment où lui vient en tête un souvenir extravagant et désagréable. Celui du jour où pris d’une rage de dents déjà plombée, et faute de place chez les dentistes chez qui il avait l’habitude de se rendre, il avait opté pour un quenottier du peuple, ce qui avait valu à des Esseintes une expérience des plus traumatisantes. Afin de guider notre analyse, il s’agira de se demander de quelles manières l’épisode du dentiste peut être représentatif d’une esthétique de la décadence. Pour répondre à cette question, quatre parties thématiques seront traitées. La première partie abordera l’expérience de l’aventure à travers le souvenir de des Esseintes, la deuxième un attrait pour le mortifère, la troisième étudiera le comique de situation, et la quatrième portera sur la trivialité du monde représentée par le quenottier en opposition au personnage dandy de des Esseintes.
I – L’expérience de l’aventure à travers le souvenir de des Esseintes
Comme présenté dans l’introduction, dans le roman, le personnage de des Esseintes se cloître dans sa maison de Fontenay-aux-Roses et veut éviter tout contact avec le monde extérieur. Pourtant c’est à travers un souvenir que le duc va paradoxalement voyager. En effet, exilé dans un monde artificiel qu’il se créé dans la maison de Fontenay-aux-Roses, le voyage et le contact au monde extérieur ne sont permis que par les rêveries et les souvenirs du duc. Dans le cas de l’épisode du dentiste, c’est à travers une expérience sensorielle propre à des Esseintes que le souvenir d’une aventure va surgir. C’est en buvant et en sentant l’odeur d’un whisky que l’ensemble va rappeler un goût similaire au phénol qu’employait les dentistes chez qui ils se rendaient, et par corrélation les soins que ces derniers prodiguaient aux dents du duc. Dans cet épisode du dentiste, des Esseintes passe de son fauteuil, installé dans la salle à manger près du feu qui crépite, au fauteuil d’un quenottier installé en bord de quai et dont les marches sont incrustées de crachats de sang éjectés par les anciens patients du quenottier. De l’intérieur de sa maison dans laquelle il est confortablement installé et en sécurité, il fait l’expérience de l’aventure à travers le souvenir de la barbarie et de la souffrance du monde qu’il a fréquenté quelques années en arrière.
Bien que fuyant le monde en s’exilant, des Esseintes le fréquente encore paradoxalement à travers ses rêveries et souvenirs, cet épisode du dentiste pouvant notamment se rapprocher de celui du voyage à Londres qu’il imagine à travers ses rêveries. Notamment, il y a un intérêt doublement porté à l’intériorité de des Esseintes, par l’expérience sensitive et par le souvenir, donc une importance est donnée à la perception psychologique d’un seul personnage, rappelant une caractéristique de la littérature décadente, s’opposant au naturalisme et à Zola par exemple qui composait une fresque sociale, soit sur la société et non sur un seul individu comme le cas de des Esseintes.
L’expérience de l’aventure à travers le souvenir de des Esseintes se fait notamment par le biais d’une écriture extrêmement sensorielle et de la narration omnisciente ; ce n’est pas uniquement un souvenir vécue par le duc, mais presque par le lecteur aussi qui semble vivre le moment avec la même intensité que le personnage au moment des faits. Les émotions et les sensations du duc sont décrites et travaillées : « La honte l’avait emporté sur la peur », le lecteur peut s’identifier, être au plus près des mêmes sensations ressenties par des Esseintes. Le vocabulaire choisi par l’auteur contribue à cette appropriation de l’intériorité de des Esseintes, en effet il est question de sensations devenues confuses, d’angoisse et d’épouvante, on passe au travers de toutes les sensations, du moment où il souffre, où il se résigne préférant « souffrir des dents, toute sa vie », jusqu’au coeur de l’action où la dent est sauvagement arrachée par le quenottier, jusqu’à la libération où le duc se retrouve dans la rue « joyeux, rajeuni de dix ans s’intéressant aux moindres choses ». Moment où toute la tension narrative soutenue par le rythme très rapide des phrases permis par la ponctuation, s’atténue pour disparaitre complètement en seulement quelques mots. Bien qu’il ne se passe aucune aventure dans le roman, à travers les souvenirs de des Esseintes et donc de son intériorité, l’aventure est possible bien qu’elle ait déjà été vécue, en l’occurrence dans cet épisode 3 ans en arrière. Au cours de cette aventure chez le dentiste, des Esseintes fait l’expérience de l’aventure à travers son souvenir en ce sens un intérêt est porté à son intériorité, à l’individu, ce qui représente une caractéristique possible de l’esthétique décadente. Mais ce n’est pas la seule caractéristique du mouvement décadent repérable à travers le passage du dentiste, puisqu’il est possible de retrouver un attrait pour la morbidité, le lugubre à travers la scène très détaillée de l’extraction de dent, ce qui sera le sujet de la deuxième partie de ce commentaire.
II – Attrait pour le mortifère
Jean Veber, L’arracheuse de dents, estampe, 1904. (Gallica)
Dans son sens premier le substantif « mortifère » renvoie une chose provoquant la mort, au sens figuré, et c’est dans ce sens qu’il sera utilisé dans cette deuxième partie du commentaire, il renvoie à quelque chose de nocif, dangereux, ou sombre. En effet, à la lecture de l’épisode du dentiste, l’atmosphère lugubre et sinistre, presque angoissante se fait ressentir. Chez Huysmans pourrait se trouver une certaine complaisance dans la morbidité et de la représentation du corps malade et en souffrance. Durant tout le roman, des Esseintes est présenté comme personnage famélique ayant des problèmes à se nourrir mais surtout comme personnage névrotique. Dans le passage du dentiste, s’ajoute à ces maux celui de la rage de dent, bien qu’il s’agisse d’un souvenir du personnage, Huysmans le représente encore malade et possédé d’une nouvelle souffrance. Mais aussi, il va rajouter une souffrance à l’esthète dans cet extrait du dentiste, en effet des Esseintes déjà malade à cause de sa dent qui le fait déjà extrêmement souffrir, va subir une douleur extrêmement intense lors de l’extraction presque bestiale de cette dernière. Aussi, cette idée de complaisance dans la morbidité peut être complétée par la description et le cadre très austère de la scène, qui de la manière dont elle est rédigée rappellerait presque un roman d’horreur. En effet, il est dit au début du passage que le duc est angoissé, qu’il escalade un escalier obscur, qu’il grimpe quatre à quatre jusqu’au troisième étage. Il ne monte pas, il escalade et grimpe, il y a déjà là l’idée d’une adversité, de combat et d’efforts, même la présence du dentiste présenté comme un terrible grenadier, qui est dit porté un pantalon noir bon marché, annonce le combat, quelque chose de rustre que va subir des Esseintes. Ici il n’y a pas que de la complaisance mortifère physique, mais aussi morale, tout est fait pour inspirer l’effroi, et le mal à l’aise au duc. Des Esseintes est déjà apeuré, épouvanté, il est cloué d’horreur par les crachats rouges, qui sont les stigmates des anciens patients du quenottier et témoignent d’un grand moment de boucherie et de souffrance. Moment de souffrance qui sera qui sera vécu par le duc au moment même, où l’extraction de la dent commence, une phrase courte et succincte l’annonce : « Alors la grande scène avait commencé. » Un effet d’annonce pour une épreuve terrible que va traverser des Esseintes et le lecteur. Il est question de scène, en effet l’action est méticuleusement décrite, si bien qu’il y a un grand pouvoir de représentation mentale qui se passe chez le lecteur, témoignant d’un certain sadisme dans la représentation de la souffrance de des Esseintes. En effet, le duc se cramponne aux bras du fauteuil, la locution adverbiale « trente-six chandelles » est utilisée pour représentée la douleur, cette expression désigne le fait de voir comme des points lumineux suite à un choc violent, ou une vive douleur, les sensations ressenties sont tellement vives qu’il est possible d’en être comme assumé. Chaque sensation, est décrite, notamment la brutalité de la scène quand il est dit que que le duc hurle de toutes ses forces, qu’il tente de se défendre face à son bourreau qui commence à lui extraire la dent, ou encore quand le duc ressent les sensations qu’on lui fracasse le crâne, qu’il perd la raison tant les douleurs sont insupportables. S’il peut être possible de dire qu’il y a une complaisance dans la morbidité à travers la description très détaillée de l’effroi et du cadre très austère de la scène, c’est aussi une forme de sadisme qui peut être discutée puisque la fin du passage, une fois la dent arrachée, des Esseintes est dit retourné à sa vie normale, comme s’il venait d’oublier ses douleurs, il se retrouve « dans la rue, joyeux, rajeuni de dix ans, s’intéressant aux moindres choses. ». Toute la tension narrative du texte, est annulée, disparait en quelques mots, avec eux, toutes les sensations douloureuses du duc, qui après tant de douleurs est apaisé, allégé, annulant presque toute la description détaillée des souffrances de des Esseintes. S’il est possible de discerner une forme de sadisme et donc un attrait pour le funèbre et le mortifère dans ce passage témoignant de caractéristique de l’esthétique décadente, il n’y a pas uniquement que la scène de l’extraction de la dent qui contribue aux caractéristiques discernables de l’esprit décadent dans ce passage. En effet, la description de la scène de l’extraction de dent et du corps malade de des Esseintes revêt parfois certains éléments comiques, qui rompent avec des descriptions aux dimensions beaucoup plus tragiques chez les naturalistes de l’époque, ce qui sera le sujet de la prochaine partie.
III – La situation comique
Le comique de situation peut être présenté comme des éléments farfelus et drôles, se déroulant dans une situation paradoxale dans laquelle il ne devrait pas y avoir d’éléments de comique. Dans le cas de l’extraction de dent de des Esseintes, la scène regorge de petits éléments qui peuvent relever d’un comique de situation, voire d’un humour noir en vue de cette scène de boucherie qui se déroule sous les yeux du lecteur. Aux premiers abords, ce passage du dentiste peut rappeler cette littérature naturaliste contemporaine à Huysmans, une littérature qualifiée de putride pour les détails sanguinolent et morbides qu’elle comprend, en soi des éléments simplement réels, qu’elle mettait en avant dans les descriptions de ses oeuvres. Pourtant, quelques éléments comiques viennent contrecarrer cette approche de la littérature naturaliste, et donc s’attacher à un esprit littéraire décadent. Premièrement, la description du dentiste présenté comme : « Un terrible grenadier, vêtu d’une redingote et d’un pantalon noirs, en bois ». Le dentiste est présenté de manière assez caricaturale, fort puisqu’il arrive à soulever des Esseintes durant l’opération, possédant un air très raide et terrible que lui donne sa tenue, mais aussi par ses moustaches vernies en crocs, qui font écho à son métier d’arracheur de dents en rappelant ces dernières. Il rappellerait presque un automate, définit par la seule fonction d’arracher les dents de ses clients. Chez des Esseintes, la théâtralisation du corps de ce dernier permet aussi un comique de situation. Il n’est presque plus qu’un pantin dans les mains du dentiste qui le soulève et le laisse retomber dans le fauteuil lors de l’arrachage de dent, la scène parait cocasse. Ou encore dans les émotions même de des Esseintes très caricaturales, quand ce dernier arrive devant l’habitation du quenottier, à la vue des marches pleines de sang, il n’a plus mal, oublie la douleur, ses émotions d’horreurs ou de paralysie participent au comique de situation. Il y a un système de mise en scène du personnage qui participe au comique de situation, à ceci s’ajoute une autre stylisation comique qu’indique la locution adverbiale : « des Esseintes avait senti, dans la joue, du froid, puis ses yeux avaient vu trente-six chandelles ». Ici, il est bien indiqué que des Essseintes souffre, mais l’image des trente-six chandelles participe aussi à cette idée de scène comique que l’on peut retrouver dans les bande-dessinées quand un personnage se cogne par exemple. Si tous ces éléments peuvent profiter à une situation comique de l’extrait, ils peuvent aussi le rapprocher du théâtre grand guignol qui représentait des spectacles qui avaient pour but d’effrayer à l’aide d’histoires macabres, d’effets sanguinolents et grandiloquents. En somme, ces caractéristiques comiques ajoutées à la scène macabre de l’arrachage de dent permettent de la détacher d’une esthétique naturaliste contemporaine à Huysmans, et de l’associer à une esthétique de littérature décadente. À l’humour ajouté à cet extrait, s’associe aussi une étude de la trivialité du monde représentée par l’arracheur de dent qui est en opposition avec le personnage dandy de des Esseintes. Cette opposition des deux personnages peut aussi contribuer à la représentation des caractéristiques esthétiques du mouvement décadent en littérature, ce qui sera le sujet de la dernière partie de ce commentaire.

Luyken Casper, L’arracheur de dents, gravure sur cuivre, Dresde, Allemagne, 1698. (Utpictura18 notice #014142)
IV -Trivialité du monde représentée par le quenottier en opposition au personnage dandy de des Esseintes
Dans l’interview de Maylis de Kerangal, au début du roman, celle-ci définit à la page V, Jean de Floressas des Esseintes comme l’incarnation du dandysme décadentisme classique. En effet, un personnage dandy se définit comme un être d’exception, raffiné et élégant, qu’il s’agisse de sa toilette ou de ses goûts. Quant à l’esprit décadent provoqué par les conditions politiques, sociales et militaires de l’époque, ce mouvement rejette l’esprit scientifique, l’avénement du positivisme, mais porte un goût pour le mystère, et le funèbre. D’une certaine manière, en se rendant chez un médecin du peuple, des Esseintes rejette cet esprit de savoir et de sciences que possèdent les dentistes chez qui ils se rendaient d’originaire, le quenottier ne se préoccupe que d’arracher les dents, il ne les traitent pas comme le ferait de vrais médecins. En allant chez un quenottier du peuple, bien que la situation l’exige, des Esseintes refuse la science, aux savoirs d’un dentiste, ces savoirs que réfute l’esprit décadent en littérature, c’est la force brute qui est choisie. Le duc, en-dehors de la sphère du souvenir de l’épisode du dentiste, vit dans un monde qu’il se créé de toute pièce à travers l’ameublement et la décoration de sa maison de Fontenay-aux-roses. Il créé une sorte de musée, un monde dans lequel il est en sécurité, clos du monde, et qui finalement représente son intériorité. Dans cet épisode, il y a une contradiction, une opposition avec le monde extérieur qui présente le danger, et le dégoût, et la sécurité et le raffinement du duc. On passe du confort de des Esseintes dans son fauteuil de sa demeure à Fontenay-aux-roses à celui du quenottier, qui travaille dans une maison dont les marches sont maculées de sang. Notamment, l’opposition entre le quenottier et des Esseintes est frappante, et l’arracheur de dent à travers cet épisode du dentiste peut peut être considéré comme une personnalisation de la trivialité du monde qui par sa brutalité, son manque de goût, à mené le duc à choisir l’exil. En effet, celui-ci agresse des Esseintes qui cherche à s’enfuir. Il y a une brutalité chez ce quenottier qui se rue sur le duc qui le repousse de toutes ses forces, une force délétère du dentiste qui soulève le corps frêle et malade de des Esseintes du fauteuil rien qu’en lui ôtant cette dent déjà plombée qui peine à s’arracher. Notons notamment, que la dent représente la capacité de se nourrir donc de survivre, de la même manière que des Esseintes résiste en cherchant à fuir de son bourreau en le repoussant. Le duc est animalisé dans ce passage, comme pris au piège d’une boucherie, en effet il est dit qu’il « bêle ainsi qu’une bête qu’on assassine », il hurle de toutes ses forces, bat des pieds et se débat furieusement de ce quenottier qui se rue sur lui, et semble lui enfoncer son bras jusqu’au fond du ventre, comme si une scène de meurtre ou de boucherie était décrite. C’est une animalisation dès plus prononcée qui est représentée par la scène rappelant celle d’un combat ,tant l’intensité narrative est grande et exacerbée par la petitesse des phrases et la ponctuation extrêmement prononcée. Ceci a pour effet de provoquer un rythme saccadé et soutenu, propre aux romans d’horreurs et policiers. Le quenottier se saisit d’un instrument, comme d’un instrument de torture pour s’occuper de la dent du duc. D’une certaine manière tout ceci pourrait représenter le rapport au monde de des Esseintes, le quenottier représentant la trivialité du monde que le duc a fui et cherche encore à fuir. Pourtant, la fin du passage laisse à réflexion et fait écho à la fin de l’oeuvre, puisque même si des Esseintes refuse de se mêler au monde pour lequel il éprouve du dégout, ce n’est qu’à son contact qu’il pourra guérir. Cet épisode du dentiste le démontre bien, malgré ses réticences, son effroi et sa douleur au contact du dentiste qui représente la trivialité du monde, une fois la dent arrachée, des Esseintes se retrouve léger, dépossédé des maux que lui provoquait la dent. Ceci pouvant faire écho à la fin de l’oeuvre, puisque malgré lui, des Esseintes devra retourner au contact du monde, même s’il est réticent, pour pouvoir guérir de ses maux.
Conclusion
En conclusion, ce passage du dentiste permet un accès à l’intériorité de des Esseintes, à travers le souvenir même de cette aventure, et à travers toutes les sensations qu’il a ressenti. Le lecteur est est au plus près du personnage du duc à travers les souvenirs, et la manière dont est rédigé le passage avec des phrases rythmées et courte. À cette époque où le naturalisme primait, on s’intéressait à une société entière, on étudiait des individus, mais à travers l’oeuvre de Huysmans et notamment cet extrait du dentiste, l’intérêt se porte sur un seul individu et son intériorité. Ces caractéristiques sont celles du mouvement décadent, et raccrochent donc cet extrait d’À rebours au mouvement décadent. À ces caractéristiques de l’individu et de l’intériorité présentent dans l’extrait, s’ajoutent celles du sadisme, de la situation de comique, et de l’attrait pour le lugubre et le mortifère dont témoignent les quelques lignes de cet épisode du dentiste. Tous ces éléments permettant finalement de démontrer que l’épisode du dentiste d’À Rebours est représentatif du mouvement décadent en littérature.
OpenEdition vous propose de citer ce billet de la manière suivante :
mbaumgertner (13 décembre 2022). Esthétique du mouvement décadent et Souvenir d’un dentiste dans À Rebours de Huysmans. Master Littérature, Savoirs et Culture numérique. Consulté le 26 avril 2025 à l’adresse https://doi.org/10.58079/13bop